Les muscles du visage sont les organes de la communication et de l’expression, mais ils sont également très liés à la voix. La fonction vocale est directement influencée par la tonicité des muscles du visage qui sont indirectement reliés au larynx et à la gorge; apprendre à « placer » la voix en tonifiant les muscles du visage peut profondément influencer le larynx et la gorge. En perdant la tonicité du visage, en dormant avec la bouche ouverte, en utilisant la voix de manière trop exagérée, ou en laissant tomber le palais, nous laissons « s’affaisser » le mécanisme vocal. Il est donc important de tonifier les muscles faciaux, non seulement pour activer l’instrument de la voix, mais également pour conserver un visage jeune et sain en vieillissant.
Les muscles du visage diffèrent des autres muscles squelettiques car ils ne sont pas attachés entre deux os, mais, dans la plupart des cas, ils prennent leur origine sur un os ou un cartilage et s’insèrent dans le tégument, ou la peau, se mêlant souvent aux fibres des autres muscles. C’est ce qui leur permet de produire des expressions faciales en bougeant la peau, de réduire ou de rider la peau dans certaines zones, de bouger ou de contracter les orifices, comme dans la zone autour des yeux. Plus particulièrement, les zones autour de la bouche, la région latérale des orbites oculaires, et la région entre les yeux, sont des points de convergence pour les muscles dont les fibres ont tendance à se mêler les unes aux autres. Du fait que les muscles faciaux se chevauchent et sont dans le prolongement des fascia recouvrant le visage et le cou, ils forment une couche mobile de tissu conjonctif sur toute la surface du visage (illustration 5-1 ).
Le masque
Les chanteurs ressentent des vibrations dans la région nasale, qu’on appelle le « masque » du chanteur. Ce « masque » est principalement composé de la mâchoire, des os du nez, et de la partie inférieure de l’os frontal où se trouvent les sinus. Les chanteurs sont généralement conscients de cette zone lorsqu’ils chantent (illustration 5-2). Elle est souvent considérée comme l’un des principaux résonateurs vocaux, alors que ni les os du nez, ni la cavité nasale, ne participent réellement à la résonance de la voix. Par contre, placer la voix dans le masque affecte la fonction du larynx et du pharynx et donne lieu à une voix plus sonnante et ciblée.
Les narines et la cavité nasale
Les narines s’ouvrent dans la cavité ou fosse nasale qui est formée par les cornets nasaux du crâne séparés par un septum (cloison) en deux cavités distinctes (illustration 5-3). Ces cavités séparent les parties olfactive et respiratoire. Deux ouvertures (ou choanes) sur la partie postérieure de ces cavités s’ouvrent dans le nasopharynx.
Les muscles des narines
La dilatation et l’activation des narines sont associées avec l’inspiration, qui ouvre la gorge. Il existe trois dilatateurs et trois abaisseurs des narines (illustration 5-4). Le muscle releveur de l’aile du nez et de la lèvre supérieure , le muscle dilatateur postérieur des narines, et le muscle dilatateur antérieur. Ces muscles, comme leur nom t’indique, dilatent l’aile du nez.
Le muscle transversal du nez, qui comporte deux parties, est un compresseur des narines. La partie transverse, aussi appelée compresseur des narines, prend son origine sur la mâchoire supérieure près de l’aile du nez; ses fibres s’étendent vers le haut et l’intérieur juste derrière les narines et se mêlent dans les fascias du cartilage du nez, qui sont dans le prolongement du muscle pyramidal du nez sur l’arête du nez. La partie alaire du muscle transversal du nez prend son origine dans la mâchoire sous l’origine de la partie transverse du même muscle et s’insère dans le septum et la partie postérieure de l’aile du nez. La fonction de ces deux muscles est de tirer l’aile vers le bas et de la comprimer.
Le muscle abaisseur du septum du nez prend son origine dans la mâchoire supérieure sous le nez et s’insère dans le septum et la partie postérieure de l’aile du nez. Sa fonction est de tirer l’aile vers le bas et de la comprimer. Le muscle petit compresseur du nez est un petit muscle qui prend son origine sur le cartilage de l’aile du nez et qui s’attache sur la peau de la pointe du nez. Il abaisse aussi le cartilage du nez et comprime les narines. L’action de ces muscles est liée au voile du palais et à l’ouverture de la gorge lors du chant. La compression des narines est souvent associée avec l’abaissement et l’affaissement du palais; la dilatation des narines et le rictus, qui sont associés avec l’inspiration, ont tendance à soulever le palais et à dilater le pharynx. Imaginez sentir une odeur nauséabonde, et remarquez comme cela anime et dilate les narines et participe même à l’ouverture de la gorge.
Les yeux et le front
Bien que les yeux soient les organes de la vue, ils expriment également l’humeur et communiquent les émotions, et ils sont pour cela essentiels pour l’organe vocal. Il existe plusieurs muscles des yeux et du front (illustration 5-5). Le muscle le plus important du front, le muscle occipitofrontal, tire le cuir chevelu vers l’arrière, soulève les sourcils et ride le front. Il fait en réalité partie d’une couche tendineuse qui parcourt tout le cuir chevelu vers l’occiput à l’arrière, là où se trouve une autre partie de tissu musculaire (non illustrée).
Comme nous communiquons avec le visage et les yeux, les froncements habituels, l’inquiétude et la mine sérieuse donnent lieu à une perte de tonicité et d’expressivité, ce qui entraîne alors une perte d’énergie ou un affaissement de l’organe vocal. Les muscles orbiculaires des yeux se tendent à force de sollicitations. Nous avons également tendance à avoir « l’œil vitreux » ou à avoir l’air « hypnotisé » lorsque nous nous concentrons sur notre travail ou que nous regardons un écran, ce qui fatigue les yeux et abaisse la tonicité des muscles qui les entourent. Pour détendre et tonifier cette zone autour des yeux, il est judicieux d’adoucir ou d’éclairer le regard. Cela permet également d’être dans un meilleur état d’esprit général et d’activer son instrument vocal de manière positive. Un bon exercice pour cela n’est pas forcément de sourire mais plutôt de penser à quelque chose de drôle ou d’émouvant, de croiser le regard de quelqu’un, ou d’observer attentivement un objet.
Les joues
Les muscles des joues sont également associés avec l’activation de l’instrument vocal et avec un ton plus précis. Il existe plusieurs muscles autour des joues et de la zone au-dessus de la lèvre supérieure qui sont sollicités pour exprimer des émotions telles que la tristesse ou le rire (illustration 5-6). Le muscle releveur de la lèvre supérieure prend son origine sur le rebord inférieur de l’orbite formé par les os maxillaire et zygomatique. Il descend vers l’intérieur pour converger dans les fibres musculaires de la bouche. Sa fonction est de relever la lèvre supérieure.
Étant donné que nous avons tendance à perdre l’expressivité de notre visage, il est utile de tonifier les muscles des joues en « éclairant » les yeux et en relevant ou en gonflant les joues. La tonicité des muscles des yeux et des joues aide à activer les muscles suspenseurs du larynx et à « placer » la voix vers l’avant, pour lui donner plus de clarté. Cela permet également de maintenir une meilleure tonicité faciale et d’avoir « l’air plus jeune » en prenant de l’âge. Lorsque la tension musculaire des yeux et des joues diminue, on peut sentir la musculature du visage devenir plus mobile sur les côtés du visage et au niveau de la mâchoire, ce qui aide à ouvrir et à tonifier les muscles du palais et de la gorge.
La mâchoire et l’articulation temporo-mandibulaire (ATM)
La mâchoire inférieure ou mandibule est le plus gros os facial (illustration 5-7). La partie de la mâchoire qui forme le menton est appelée la symphyse mentonnière (ou mandibulaire); la ligne principale de la mâchoire est le corps; l’extension vers le haut qui forme l’articulation et les attaches musculaires est le ramus. Le ramus se sépare en deux parties: le processus coronoïde à l’avant et le condyle à l’arrière. Le processus coronoïde est le point d’attache pour le muscle temporal; le condyle s’articule avec l’os temporal pour former l’articulation temporo-mandibulaire.
L’articulation temporo-mandibulaire est située directement devant le conduit auditif externe, qui est l’ouverture de l’oreille (illustration 5-7). Directement devant cette ouverture se trouve un creux qu’on appelle la fosse mandibulaire. Les condyles de la mâchoire se trouvent dans ce creux et, lorsqu’ils pivotent, ils produisent l’action de charnière de la mâchoire. Les condyles peuvent également glisser en avant par rapport à la fosse mandibulaire afin que la mâchoire dans son ensemble puisse avancer et reculer. Lorsqu’un condyle avance et que l’autre recule, la mâchoire peut broyer les aliments.
L’articulation temporo-mandibulaire est en fait une charnière capable de broyer. Entre la fosse mandibulaire et le condyle se trouve un cartilage appelé le disque articulaire. Sur sa surface inférieure, le disque articulaire forme une surface arrondie qui enserre le condyle et qui est capable de pivoter à l’intérieur du disque, produisant une action de broyage de la mâchoire (illustration 5-8a). En revanche, ce disque n’est pas fixé à l’os temporal mais est lubrifié sur sa surface supérieure avec du liquide synovial afin de pouvoir glisser en relation avec la fosse mandibulaire, emmenant avec lui le condyle et la mâchoire inférieure (illustration 5-8b).
L’articulation temporo-mandibulaire est en réalité composée de deux articulations distinctes: la rotation est assurée par l’articulation du condyle avec le disque articulaire, et la translation est assurée par l’articulation du disque articulaire avec l’os temporal. Ces deux articulations sont lubrifiées, et l’ensemble de l’articulation est contenue dans un ligament capsulaire et soutenue par deux autres ligaments. La mâchoire est également soutenue par le ligament stylomandibulaire (non illustré), qui s’étend du processus styloïde de l’os temporal jusqu’à l’angle de la mâchoire.
La position de la mâchoire lors du chant
L’usage normal de la parole ne nécessite pas d’ouvrir grand la bouche et la mâchoire; les condyles de la mâchoire pivotent dans le disque articulaire mais aucun autre mouvement n’est effectué. Pour le chant, en revanche, la mâchoire doit s’ouvrir plus amplement afin que le son ne soit pas bloqué et pour agrandir la cavité orale suffisamment pour une meilleure résonance. Dans ce cas, la mâchoire ne doit pas seulement s’ouvrir au niveau du condyle mais aussi glisser vers l’avant; sinon le condyle se coince et la mâchoire ne peut pas s’ouvrir complètement (illustration 5-8b). Lorsque le condyle glisse en avant, on peut sentir une poche s’ouvrir à l’avant de l’oreille inférieure. La plupart des gens n’ont pas l’habitude d’ouvrir librement la mâchoire, et ont souvent tendance à serrer ou restreindre leur mâchoire.
Les muscles de la mâchoire
Trois muscles sont responsables des actions de broyage et de mastication de la mâchoire (illustration 5-9). Le muscle temporal, le muscle masséter, et les muscles ptérygoïdiens latéral et médian. Ces muscles agissent ensemble pour produire les mouvements de mastication et de broyage de la mâchoire. Ces muscles abaissent ou ouvrent la mâchoire, ils sont tous situés sous la mâchoire (illustration 5-10). Les chanteurs se focalisent souvent sur les fermeurs les plus grands de la mâchoire lorsqu’ils cherchent à relâcher celle-ci. Mais ces muscles de la mâchoire ont évolué, ils font partie intégrante de la musculature de la gorge, s’attachant à l’os hyoïde et resserrent de manière sympathique en réponse à la tension dans la gorge, c’est pour cela que les muscles de la gorge sont essentiels dans le processus de relâchement de la mâchoire.